Illégalité de la dot : Les femmes n’en parlent pas
Selon l’article 244 du code des personnes et des familles du Burkina Faso « Le versement d’une dot soit en espèces, soit en nature, soit sous forme de prestations de services est illégal ». Mais dans les faits, une étude menée par Isabelle Akouhaba Anani en 2008 pour le compte de « l’Institut Danish Human Rights » a révélé sans surprise que la dot est incontournable pour la plus part des ethnies vivant au Burkina Faso.
En fonction des sociétés et des époques, la dot peut avoir plusieurs connotations. En droit romain par exemple, la dot est l’ « ensemble des biens apportés par la femme pour contribuer aux charges du ménage » ; en Afrique noire, surtout en Afrique de l’ouest, elle est pour la plus part des sociétés la part contributive du jeune marié et de sa famille à ce qu’on pourrait qualifier du « prix de transfert de la femme de sa famille vers la famille de son mari ».
Selon l’étude d’Isabelle Akouhaba Anani, les Dagaris, les Gourounsi, les Gourmantchés, les Touaregs, les Bobo… sont entre autres les ethnies les plus exigeantes en matière de dot au Burkina Faso.
Avec l’émulation de la société, l’aspect symbolique de la dot a laissé la place à des demandes souvent exagérées.
Ainsi, en janvier 2013, un jeune employé de commerce à Bobo-Dioulasso a vu sa demande de mariage traditionnel conditionné par le versement de 400.000 francs cfa de dot. Non content d’avoir soutiré une telle somme à un « débrouillard », la famille de la jeune fille a mis au compte du futur marié tous les frais relatifs à l’organisation dudit mariage (des voyages dans son village, des dons d’animaux, repas festifs, danses populaires). Au finish, sans le savoir le pauvre avait investi plus de 1.500.000f dans l’organisation de son mariage. Epinglé par son patron, l’infortuné a du fuir pour échapper à la prison. Laissant derrière lui sa femme chèrement acquise.
Cet exemple qui ressemble à bien d’autres à Bobo et à Ouagadougou relate des conséquences possibles de la surenchère dont certaines familles font preuve autour des demandes de mariages.
Toujours selon l’étude d’Anani, la dot se mue au gré des avancées technologiques. Au Togo et au Bénin par exemple, des familles demandent des réfrigérateurs, des téléphones portables, des voitures, des motos avant toute célébration de mariage.
La conséquence de ces surenchères, c’est que les célibataires et les filles mères se font de plus en plus nombreux.
Le silence des ONG
Et pourtant parmi la pléthore d’associations féminines, d’organisations non gouvernementales qui luttent pour le bien être des femmes, aucune n‘a encore eu la noblesse de mettre au premier plan la lutte pour l’applicabilité de l’article 244 du code des personnes et des familles burkinabè. Symboliquement la dot est le prix du transfert de la femme de sa famille vers la famille de son mari. De la passation de l’autorité parentale à celle du mari. Elle est donc par essence ce qui ouvre la voie à la domination, au port de la culotte par monsieur. Dans un monde qui se veut plus égalitariste que la nature, on a encore du mal à comprendre pourquoi les jusqu’au-boutistes du tout pour la liberté de la femme restent inactifs sur cette question.
Ousséni Bancé
Lefaso.net
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